Didier Berberat
Conseiller aux Etats

La session de printemps des Chambres a été riche en péripéties. On peut citer le crédit additionnel pour Expo 02, la Fondation Suisse Solidaire ou la révision de l’assurance-chômage. Un autre sujet important mérite également d’être mentionné, à savoir l’acceptation, par le Conseil national, de deux propositions socialistes demandant la transparence des rémunérations touchées par les membres des conseils d’administration et par les dirigeants des entreprises de la Confédération et des sociétés cotées en bourse.

Le National a clairement montré, à l’image d’une grande partie de la population suisse, qu’il en avait ras-le-bol des salaires extravagants versés par les anciennes régies fédérales, par Swissair ou encore par ABB qui a " remercié " deux de ses anciens dirigeants en leur faisant un cadeau de 233 millions de francs. La Suisse est, en effet, avec la Pologne, la Chine ou l’Arabie Saoudite, un des seuls pays à ne pas publier ce genre d’informations. Le Conseil fédéral souhaitait se laisser le temps d’examiner si le système d’autorégulation annoncé par la bourse suisse et par economiesuisse pour le mois d’avril était suffisant. La Chambre du Peuple n’a pas voulu attendre et a tout d’abord accepté une initiative parlementaire de notre camarade Pierre Chiffelle demandant la transparence pour les membres des Conseils d’administration. Il est allé encore plus loin en suivant, par 105 voix contre 49, la motion de Suzanne Leutenegger exigeant la transparence intégrale des traitements des cadres dirigeants et des administrateurs des sociétés cotées en bourses et des entreprises de la Confédération.

Ce vote positif a pu être acquis grâce à une alliance inhabituelle entre la gauche et l’UDC qui a ainsi neutralisé les radicaux, partisans comme le Conseil fédéral de l’autorégulation et de l’attentisme. Si, pour Blocher et ses troupes, la transparence permet aux actionnaires de défendre leur patrimoine en sachant ce qui se passe à la tête des sociétés, le PS et ses alliés souhaitent que cette transparence soit prévue dans une loi et non selon le bon vouloir de la bourse ou de l’économie. De plus, seule une publication individuelle et non globale de ces salaires permettrait de protéger les travailleurs, souvent mal payés, les contribuables et les petits actionnaires contre ces abus choquants. Il est temps que la Politique reprenne le dessus par rapport à l’arrogance de l’Economie et notre espoir est que le Conseil des Etats, qui devra traiter de ces propositions, en prenne aussi pleinement conscience.